INDE Journal de voyage Lundi 10 octobre 2011 L’avion vole au-dessus de l’Iran. Une hôtesse belle
comme une actrice de Bollywood me propose un verre de jus d’orange. Il fait
froid dans cet avion. Je suis en route pour Mumbai, anciennement Bombay.
Depuis 1987, à la faveur d’un été adolescent passé tout seul (et donc avec
bonheur), j’ai envie d’y aller. En Inde. 1987, A Passage to India,
le dernier film de David Lean passe à la télé, j’ai 17 ans, je ne suis pas
sérieux, ni amoureux (quoique), ni vieux et je me prends à rêver de voyages,
de bouts du monde, d’éléphants et de la Porte de Indes. 2011, je n’ai plus 17
ans, je ne suis toujours pas sérieux, je suis plus vieux et je vais voir un
bout du monde mais aussi le Gateway of India, Calcutta, Bénarès (aujourd’hui
Varanasi) et le Gange, je vais prendre le train, passer par Delhi, voir le
Taj Mahal, visiter le Rajasthan : Jaïpur la ville rose, Udaïpur et
ressentir le plus possible de parfums, de couleurs, de visages. A présent je
suis calmé et patient (encore que…) j’ai l’expérience des voyages et l’envie
de faire partager tout ça. Mardi 11 octobre 2011 2h16 du matin dans une chambre d’hôtel de Mumbai.
Ici les trottoirs sont des dortoirs, les hommes sont allongés sur le sol les
uns à côté des autres pour la nuit. La ville la nuit je la traverse en taxi
et c’est une expérience. Le chauffeur fait rouler la voiture aussi vite qu’il
peut et je pense à mon sac simplement posé sur le toit et qui pourrait
s’envoler à tout moment. J’ai dormi dans l’avion alors au milieu de la nuit
le sommeil se refuse. Il finira par venir. Il finira. Fin de journée. Comme une plongée dans l’humain, au
cœur de l’humanité indienne. La ville est un mouvement perpétuel, à pied, en
voiture, en moto, rien ni personne ne s’arrête, jamais. Alors moi aussi je
marche. Et je me perds. Ici personne ne connaît parfaitement la ville, même
pas les chauffeurs de taxi. Et pourtant ils sont prêts à t’emmener partout.
Un regard vers toi, un coup de klaxon : « tu montes
chéri ? » - Merci mais non merci. Je préfère la marche à pied. Je regarde le plan. Il est faux, forcément puisque
je suis perdu, à moins que ce ne soit la tête que je perds. Possible aussi. - Mahatma Gandhi Road, please…. - Vous y êtes. Alors je continue. - Gateway of India, c’est bien par là ? - Pas du tout, c’est de l’autre côté. Putain de plan. Je fais donc demi-tour et ma chemise
en a assez de la chaleur alors elle transpire aussi. Finalement j’arrive au
Gateway of India, arc de triomphe anglais qui fait face à la mer d’Oman et
construit en 1911 pour le venue du Roi Georges V et de la Queen Mary. Sur la
place, peu d’occidentaux, le touriste est indien. Moi aussi je suis un
touriste. Ça va pas non ? Le touriste il a un bermuda, des tongs, la
peau rougie par le soleil et l’appareil photo en bandoulière alors que moi le
bermuda, merci mais non merci. Pour le reste, c’est quand même un peu ça. Sur
la place il y a aussi Mister Mac qui veut me vendre une visite d’Elephanta
mais je n’aurai pas le temps aujourd’hui. - Pourquoi ? - Parce que le programme est déjà chargé : le
musée national au nom à rallonge et dont la visite devrait me prendre un bon
bout de temps puisque je suis passé devant et qu’il m’a l’air grand comme le
château de Versailles. - Et c’est tout ? me répond Mac. - Euh non, je voudrais voir le Taj Mahal Hôtel. - Je peux vous faire la visite du musée. - What’s your name? - Mister Mac. - Mister Mac, je pars demain pour Calcutta mais je
reviens à Mumbai et alors j’irai à Elephanta avec vous. - Voici ma carte.
Je la prends, jette un coup d’œil, c’est
écrit : « Mister Mac » dessus. Je l’aime bien. Je le lui dis.
Il me dit qu’il peut aussi me faire visiter tout le reste de la ville
aujourd’hui, le pays entier et même le reste du monde. Il m’est très
sympathique Mister Mac mais pas aujourd’hui. Maintenant j’ai faim, le guide
que j’utilise propose des endroits alors je choisis celui qui a l’air le
moins engageant, histoire d’éviter les éventuels touristes. Ça s’appelle
Bagdadhi. Le gamin qui m’indique une table ne comprend pas mon anglais. Un
autre arrive. Je commande. Chicken Biryani. C’est délicieux en plus. 70
roupies. 1 euro et 10 centimes. Je laisse le billet de 100 et ressorts. Il
fait toujours 35 degrés et on veut me vendre des tambours, des ballons géants
en forme d’aubergine (qui achète ça ?), des montres, encore des
tambours. - J’en ai déjà acheté un, dis-je au vendeur de
tambour. - Mais celui-ci est pour vos enfants. - Je n’ai pas d’enfants. Je les mange les enfants,
avec du riz. - Hein ? - C’était une blague. Allez, je vous le prends votre
tambour… Mais il est déjà parti. J’ai dû lui faire peur. Je
rejoins le musée au nom à rallonge : Chatrapati Shivaji Maharaj Vastu
Sangrahalaya (formerly Prince of Wales Museum of Western India). Ouf. Le
musée présente une histoire du pays, de la préhistoire à nos jours avec des
poteries, des jouets, des ustensiles, des vêtements, des pièces de monnaie,
des statues, des photos et même des toiles d’art moderne indien. Il propose
aussi des ventilateurs et des salles climatisées et croyez-moi, ça fait du
bien. Je sors du musée et un homme me propose d’acheter un tambour, un autre
un ballon (en forme d’aubergine). Je vois des enfants assis par terre en
train de jouer, une famille entière qui semble vivre sur ce bout de trottoir…
C’est la fin de la journée, la nuit commence à tomber et je marche encore
dans la ville. Je fais le tour du Taj Mahal Hôtel sans en trouver l’entrée.
Peu importe. Je m’en fous du Taj Mahal Hôtel. De grands panneaux montrent
Marion Cotillard portant du Christian Dior. Je m’en fous aussi. Je vois des
petites filles à la beauté stupéfiante demander qu’on leurs achète du riz
pour nourrir leurs familles. Et je ne m’en fous pas. J’ai juste envie de
pleurer. J’échoue dans un magasin de tissus, ça s’appelle Fabindia. C’est
beau. Des tissus magnifiques, des saris de toutes les couleurs, des tuniques,
des étoles, de la soie, du commerce équitable et des cadeaux à faire pour les
amis et la famille. Je reviendrai là. Je reviendrai aussi pour Mister Mac.
Aussi pour acheter du riz à qui me le demandera. Tout le riz qu’elle voudra
la petite fille aux grands yeux noirs et à l’air inquiet. Mercredi 12 octobre 2011 Scènes de rue à Bombay. Un bœuf malingre tire une carriole
au milieu des voitures et de la poussière. Un homme malingre tire une
carriole au milieu des voitures et de la poussière. Une femme assise par
terre derrière une balance propose aux passants de se peser moyennant
finances. Un tout petit, deux ans au plus, tenant à peine debout, patauge
allègrement, tout nu, dans le caniveau. Une femme sur la voie rapide balaie
la chaussée en évitant les voitures. Deux femmes accroupies dans le jardin du
musée national retirent les mauvaises herbes, à la main. Un taxi dans lequel
j’ai pris place fonce dans la circulation comme s’il participait au rallye de
Monte Carlo, évitant les accidents de justesse ou par miracle ou bien les
deux.
Ce matin je quitte Mumbai pour Kolkata, autrement
dit Calcutta. En train il faut plus de 24 heures mais en avion 2 heures et
demi suffisent. Je prends l’avion. A peine débarqué dans la ville de Mère
Térésa et Satyajit Ray, je me retrouve encore dans un taxi de la mort qui
transforme une route à 2 voies en autoroute à 3 voies, sans connaître
exactement l’adresse où je veux qu’il me dépose. Le ciel est d’un gris de
cendres et l’air semble si chargé en pollution. Le taxi passe par des
quartiers hallucinants, petites rues défoncées, vaches en liberté, hommes
tirant d’autres hommes sur des chars à bras, hommes mutilés, femmes d’une
beauté à couper le souffle d’un marathonien… On trouve finalement l’Embassy
Building, grâce au GPS naturel : les yeux et je laisse mon chauffeur
suicidaire et dévot (car bien sûr il a profité de certains arrêts pour prier
Shiva ou Vishnou, quand on conduit comme lui, vaut mieux mettre toutes les
chances de son côté). Ritwick est déjà là. Il travaille pour Calcutta Walks,
une entreprise qui propose de visiter la ville autrement et d’être hébergé
chez l’habitant. Je vais passer les quatre prochaines nuits chez Madame
Thavrani qui outre son activité d’accueil des voyageurs craintifs, tient une
agence matrimoniale et enseigne l’anglais. Elle a un grand appartement au
centre ville et chaque mercredi soir s’y tient une cérémonie religieuse
pendant laquelle on chante et on danse. Ce soir c’est mercredi et je suis
vraiment dans un monde différent du mien. Ritwick a la trentaine, une
moustache à la Burt Reynolds, pour le reste, c’est Harry Potter, indien. Il
m’emmène faire un tour dans la ville où il est né, m’expliquant les endroits
devant lesquels on passe, les plats préparés dans la rue, les restaurants les
plus intéressants. C’est la nuit, je traverse un bout de Park Street, dîne au
Blue Sky Café d’un merveilleux poulet tikka et rentre à pied chez Madame
Thavrani. Demain Ritwick me fait visiter sa ville, ça devrait durer 7 ou 8
heures. Les vacances quoi ! Jeudi 13 octobre 2011 Calcutta. Aujourd’hui dans un temple un prêtre a demandé
pour moi la protection de Kali à qui la ville doit son nom. C’est l’une des
terribles activités auxquelles Ritwick m’a soumis au long de cette journée
incroyable. Première étape : le temple. L’hibiscus est partout, c’est la
fleur que l’on offre à Kali et je ne suis pas le seul à vouloir la protection
de la déesse. Il faut voir la ferveur avec laquelle les croyants de tous âges
viennent demander son soutien. Dans l’enceinte du temple, je vois un homme
déposer des pièces près d’un feu où l’on sacrifie des chèvres noires. Juste à
côté un autre homme décharné et presque nu, allongé sur le sol dans une
position qui rend son corps tordu, semble dormir paisiblement. Plus loin deux
femmes devisent calmement alors que dans un renfoncement bien sombre un homme
entretient un feu et se tournant vers moi, me sourit. Je dépose à mon tour
des pétales d’hibiscus sur la statue de la déesse tandis que le prêtre
attache à mon poignet droit un fil de coton rouge et me passe sur le front un
peu de couleur. Fort de la protection de la déesse je poursuis avec Ritwick
qui m’emmène dans le centre de la ville, celle qui conserve les monuments et
bâtiments du temps de la domination britannique : Victoria Memorial,
High Cour of justice, Town Hall (devenu un petit musée sur l’histoire de
Calcutta avec des minis sons et lumières kitchissimes). Ritwick en profite
pour me donner un cours d’histoire : les Anglais, les Indiens, les
grandes figures de la politique et des arts (Tagore, Ray). Pour respirer on
se pose au bord du Gange. Je vois des hommes et des femmes rendre hommage aux
disparus, un des hommes s’est rasé le crâne et devra porter du blanc
plusieurs jours. Juste au dessus du fleuve, un train datant probablement des
années 50 (1850 ou 1950…) passe lentement.
La chaleur est écrasante alors retour dans le
quartier juridique pour un encas chez Mongini’s. Le nom est plutôt italien
mais les pâtisseries son indiennes et recommandables. On part digérer le
déjeuner dans les jardins de la Saint John Church, église anglicane fondée
bien avant ma naissance. Lieu tranquille au milieu d’une ville hallucinante.
Début d’après-midi, retour au bord du fleuve pour un aller-retour rapide sur
l’embarcadère qui en assure la traversée. Ritwick veut me montrer les
ateliers des faiseurs de statues de divinités hindoues. Ils travaillent la
paille et l’argile dans des cabanes en bois dans lesquelles ils vivent aussi.
Des statues il y en a partout, de toutes les tailles avec plein de bras,
beaucoup de bras. Fin d’après-midi, on passe prendre un café à l’Indian
Coffee House dans le quartier universitaire. Une grande salle ancienne où des
serveurs portant des costumes traditionnels (dont un chapeau bizarre, qui
m’irait pas mal à Paris) apportent une petite tasse de café à 10 roupies. On
peut aussi y manger mais faut avoir vraiment faim. L’Indian Coffee House est
au milieu de dizaines de boutiques, books store proposant des milliers de
livres aux étudiants qui pullulent par ici. Pour finir la journée, Ritwick me
propose d’aller voir un temple Jaïn. Let’s go my friend. Comment dire ?
Le temple est une merveille à la décoration très chargée. Là encore la
ferveur des fidèles et la force du leur foi sont impressionnantes. Les Jaïns
ont des principes assez stricts : certains pour être sûr ne n’avaler
aucun insecte (car tout être vivant a une âme), porte des tissus autour de la
bouche. Quelle journée ! J’ai encore assisté à des scènes de rue
incroyables, toutes ces choses qu’il me faudra assimiler avec le temps. Quel
pays. Où suis-je ? Ai-je vraiment vu tout ça ? Probablement. Ouais.
Je ne sais plus trop. Vendredi 14 octobre 2011 Le cœur de la ville palpite à la vitesse du cheval
au galop, ou plutôt du rickshaw. Les marcheurs te passent dessus pour
avancer, les véhicules pourraient le faire aussi également. Sans problème.
J’ai failli mourir mais bon, voyager c’est aussi prendre des risques.
L’agitation permanente est vite fatigante, au physique, au mental mais je
suis en Inde alors je ne plains pas, sinon j’aurais choisi le Club Med en
Tunisie et ça, c’est pas moi. Ici chacun semble suivre son chemin sans se
préoccuper de l’autre, celui qui marche, celui qui dort au milieu du
trottoir, celui qui mendie, celui qui mange, celui qui fait à manger, celui
qui ne fait rien, celui qui visite… La rue est un spectacle. Chacun a l’air
d’accepter son destin, qui ne possède rien et qui sort d’une voiture dont le
montant permettrait à une famille de vivre pendant dix ans. Bon d’accord
c’est plus facile d’accepter son destin quand tu peux tout t’offrir mais ça
veut dire aussi que l’argent, le statut social ne sont pas tout dans la vie
et surtout pas le plus important. Je le savais déjà mais ça fait du bien de
se le voir rappeler de temps en temps.
Visite du jour : Indian Museum. Le bâtiment
vaut le coup d’œil mais interdiction de filmer sinon le gardien vient te
hurler dessus dans un mélange d’hindi et d’anglais… Les collections sont
moins intéressantes, particulièrement celles consacrées à tous les types de
caillou qu’on trouve dans le secteur, présentés dans des vitrines
poussiéreuses. Quelques bronzes de Shiva et Ganesh sont à voir néanmoins. A
côté de l’Indian Museum, en tout cas pas trop loin : New Market.
Gigantesque bazar dans lequel tu te perds comme Rita Hayworth dans le palais
des glaces de La Dame de Shangaï. Avec ta tête de touriste, tu seras très
vite repéré et alors un rabatteur insistant voudra te montrer le contenu de
plein de boutiques qui ne t’intéressent pas forcément, mais je suis là
depuis cinq jours maintenant et je sais dire non. Fin d’après-midi, balade au
Victoria Memorial, érigé à la mort de la reine éponyme (qui n’a jamais mis
les pieds dans ce pays). On y admire quelques toiles et armes d’époque mais
on y va surtout pour ses calmes jardins qui dans cette ville dingue, offre un
moment de douceur. Les amoureux ne s’y trompent pas et viennent en nombre
profiter de silence pour se tenir la main et s’embrasser. Loin du reste du
monde. Samedi 15 octobre 2011 Ville monde, Calcutta fatigue. Ville jungle, Calcutta
t’absorbe et te recrache. En une journée tu avaleras la poussière, elle
rentrera sous ta peau et coulera dans tes veines. Réveil avant six heures car
Ritwick veut commencer tôt ce matin. Au programme : aperçu des
différentes communautés qui fondent certains quartiers. Et c’est parti pour
trois heures de déambulations dans le dédale des rues des quartiers chinois,
juif, arménien, catholique, jaïn, etc. A chaque communauté son morceau de la
ville et son lieu de culte. Dans les rues étroites de Calcutta je m’efforce
d’éviter les charrettes à bras et autres scooters tout en ouvrant grand les
yeux pour voir ce que les gens t’offrent à voir. Toujours les mêmes
spectacles de petits commerces de bouche, de quincaillerie, chaussures,
vêtements, fruits, légumes, fleurs, etc. Les rues s’enchaînent comme les
épisodes d’un soap mexicain et je ne sais plus où je suis. Ritwick continue
de parler aux touristes australiens qui nous ont rejoints mais je décroche un
peu, je prends des photos et je les suis. Où qu’ils aillent. La matinée passe
ainsi jusqu’aux adieux avec Ritwick, devant un taxi qu’il a arrêté pour moi.
Bye Ritwick. Je passe l’après-midi à faire du shopping (l’une de mes
activités favorites). Sauf que le mot shopping ici consiste à éviter les
rabatteurs pour atteindre la bonne affaire. Celles-ci se font dans les
magasins d’état, notamment sur Nerhu Road, celui consacré aux produits du
Cachemire : authentiques à 100% et d’un prix équitable. La qualité du
tissu, la finesse du tissage, la splendeur des couleurs et la douceur au
toucher font des étoles et pashminas proposés des œuvres d’art. Dimanche 16 octobre 2011 Prendre le train, c’est toute une aventure. Surtout
à partir d’Howrah Junction, la gare de Calcutta. Comme c’est écrit dans mon
guide : « bonne chance ! ». Sauf si pour éviter de
prendre un mauvais train, vous faites appel à un porteur, reconnaissable à
son habit rouge et à son art de porter les bagages sur la tête. Il vous
emmènera jusqu’à votre place. Voir un homme porter ainsi un sac de 15 kilos à
votre place a de quoi être gênant mais 1. vous le faites travailler et 2. Il
connaît la gare et tous les trains et pas vous. La gare de Calcutta est comme
le reste de la ville, complexe et bruyante. L’activité humaine y est
incommensurable et elle peut faire peur mais bon, rien d’insurmontable. Une
fois dans le train, assis à la bonne place, il suffit d’attendre que le train
démarre et vous emporte à destination avec patience en regardant le paysage.
Il y a différentes catégories de places dans les trains indiens. Du banc en
bois à la couchette en wagon climatisé. Etant donné que le train est lent
(plus de 7 heures pour faire 450 kilomètres), je recommande la couchette
climatisée car on peut s’y installer et dormir. Cela dit, les autres
catégories se tentent aussi, surtout quand on est plus voyageur que touriste…
Je débarque à Gaya Junction en milieu d’après-midi, aussi au milieu des
vaches qui se baladent sur le quai, attendant peut-être leur train…
Ma destination est Bodh-Gayâ à une quinzaine de
kilomètres de là. Je prends le premier taxi qui se propose et tant pis si la
somme qu’il me demande est trois fois le prix normal. Il me laisse devant le
Vihar, un hôtel d’état dans un sale état… La chambre est décatie à souhait,
les fourmis ont la taille d’une phalange et semblent beaucoup s’y plaire. Je
dépose mes affaires et ressors aussitôt. Bodh-Gayâ est la ville dans laquelle
Siddhârta est devenu Bouddha en atteignant l’illumination. Chaque année le
Dalaï Lama vient y faire un tour mais je ne le vois pas. Pas sûr
qu’aujourd’hui Siddhârta retente le coup dans le coin. Seuls les temples
valent la peine de se déplacer car la petite ville est très sale et à la nuit
tombée (18h00), marcher dans la rue (si on peut appeler ça une rue), c’est
risquer sa vie : aucun éclairage public et tous les véhicules qui
foncent, certains sans lumières… Plusieurs fois j’ai senti le souffle d’une
voiture passant trop près de moi. A 18h30, j’échoue dans un restaurant thaï
qui passe en boucle les trois mêmes chansons de Bryan Adams… La déprime n’est
plus très loin… Lundi 17 octobre 2011 A Bodh-Gayâ il y a des temples et notamment celui
dédié à l’illumination de Siddhârta en Bouddha. A Bodh-Gayâ il y a aussi les
marchands du temple. Ils vendent tout, y compris des jouets et des armes
jouets. Dans un lieu sacré du bouddhisme, franchement… Aujourd’hui je
reprends le train. En sleeper, c'est-à-dire qu’on se retrouve à 4 ou 5 sur
des banquettes prévues pour 3, avec des couchettes au dessus, bien remplies
elles aussi. En face de moi un homme bien charpenté, tout de blanc vêtu, se
met à chantonner et à se frapper la tête avec les mains. Juste à côté, des
jeunes visiblement amis discutent comme si de rien n’était en se préparant
des boulettes de bétel. L’arrivée à Vârânasî est dantesque : une fois
franchis les passagers du train allongés devant la porte de sortie, je suis
le jeune homme dépêché par la guest house dans laquelle je vais loger. Devant
la gare des centaines de personnes attendent, assis par terre. Les rues de
Vârânasî sont comme celles de Mumbaï ou Calcutta : bruyantes,
fourmillantes, d’une perpétuelle activité. Sauf que, dès qu’on s’approche du
Gange, les rues deviennent ruelles, le sol de terre devient de pierres et il
faut poursuivre à pied en évitant les vaches. Je dépose mes affaires dans la
chambre et sors dîner. Le restaurant Lotus propose de manger sur une terrasse
surplombant le fleuve sacré. La nuit est tombée, la Lune se montre, le Gange
semble endormi. Magique. Mardi 18 octobre 2011 J’ai vu les flammes. J’ai vu les corps brûler. Les
corps des morts que l’on brûle pour que les cendres soient jetés dans le
fleuve. J’ai entendu les hommes chanter et les prêtres ont officié. La nuit,
quand la lumière du feu, sur les Ghâts, éclaire les bateaux et les yeux des
familles des défunts. J’ai senti les souffles se mélanger, ceux de la mort et
ceux de la vie dans le calme des funérailles hindoues. Sous moi l’eau du
Gange apportait toute sa force, cette force que les hommes viennent prendre
en s’y baignant, en la buvant. Sur une barque de (mauvaise) fortune j’ai
participé par la présence aux cérémonies mortuaires.
J’ai communié avec les morts et sous un ciel
de nuit sans étoile, je suis resté paisible face à la fin de tout. A Vârânasî
les morts viennent achever leur chemin et aujourd’hui, ce soir, j’étais là
aussi, pour les accompagner, près du feu et de l’eau, face aux flammes et sur
le fleuve. Le fleuve de vie et le fleuve de mort, le Gange. Mercredi 19 octobre 2011 Hasan est un homme affable, toujours prêt à rendre
service, il connaît quelques mots de toutes les langues et ne me lâche plus
depuis hier. Officiellement il a un bateau pour emmener les touristes sur le
Gange mais il a aussi d’autres activités comme amener ces mêmes touristes
dans des ateliers de tissage de la soie afin de ventes (et moyennant
rétribution pour lui). C’est ainsi que je me retrouve déchaussé sur un
matelas face à Ashok le vendeur de choc et ses assistants, pour un défilé de
pashminas, étoles et autres saris aux tissus fins, aux tissages travaillés et
aux couleurs resplendissantes. Différentes qualités pour différents prix.
Ashok prétend avoir des commandes des Galeries Lafayette et du Bon Marché
(j’y crois à moitié, voire pas vraiment) et veut me convaincre de la qualité
de ses produits. Alors je touche les tissus, je fais mine de juger mais je
suis un ignorant. J’achète quelques pièces qui me paraissent de haute qualité
et quitte l’atelier d’Ashok. Hasan m’entraîne dans les petites rues de
Vârânasî dans lesquelles on ne croise ni voiture, ni tuk-tuk, ni camionnette,
seulement des vaches, des piétons et des vélos. Il y a 2 Vârânasî : la
ville à l’image de Calcutta et Bombay, à la circulation folle, aux bruits
assourdissants et les quartiers qui longent les Ghâts, suites de boutiques,
de restaurants, d’hôtels, de vieilles maisons, de palais de Maharajah
abandonnés. S’y promener et s’y perdre un peu est une expérience unique. On y
croise aussi des occidentaux « indianisés » venus chercher par ici
ce qui leur manquait ailleurs, habillés comme des pratiquants hindous,
tentant d’intégrer un monde qui les fascine. Je me promène encore sur les
Ghats, appareil photo autour du cou, sans Hasan parti chercher d’autres
clients. On me propose de lire mon avenir (je préfère ne rien savoir) ou de
faire un autre tour en bateau. Mais aujourd’hui je quitte Vârânasî pour
Delhi.
Le vol Jet Airways dure à peine plus d’une heure que
je passe dans les bras de Morphée. A l’aéroport de la capitale indienne, je
rencontre Vivek qui sera mon chauffeur pour la visite du Rajasthan. Il me
dépose à l’hôtel Le Roi, oasis de calme dans un quartier populaire. Je vais
profiter 2 nuits des services haut de gamme de l’endroit et surtout d’une
salle de bains moderne. Parfois ça fait du bien par où ça passe. Jeudi 20 octobre 2011 Dans Delhi. La capitale indienne est plus calme que
ses consœurs vues auparavant mais la différence repose. Un peu. Passage au
Red Fort, grande citadelle en briques rouges dans laquelle on admire des
jardins et bâtiments de l’époque Moghul. Pas très loin, Jama Masjid est la
plus grande mosquée du pays mais à l’heure où je passe, la prière est en
cours et les non-musulmans ne peuvent y entrer. Je repars dans les rues
entourant la mosquée, énorme marché à ciel ouvert où l’on trouve, comme
d’habitude, de tout. Ici c’est aussi le bordel pour circuler mais après 10
jours de voyage je pense maîtriser assez bien le déplacement urbain. En fin
d’après-midi je visite la dernière demeure de Gandhi, là où il dormait et
priait. Là aussi où il fut assassiné en 1948. C’est émouvant de voir ces
objets lui appartenant, ces lieux qui furent les siens. Ceux d’un homme qui changea
le cours de l‘histoire de son pays. Aussi du monde.
Vendredi 21 octobre 2011 Scènes de rue à Delhi. Un homme, une femme et 2
enfants sont assis sur la selle d’une petite moto qui roule entre un taxi et
un tuk-tuk, l’un des enfants dort. Un homme a posé sur le trottoir une toile
sur laquelle il propose des dentiers, il assure lui-même la mise en bouche.
Des écoliers courent pour rattraper un bus qui vient de repartir, le bus est
déjà plus que plein. Un conducteur de rickshaw dort allongé sur la
bicyclette, la tête posée sur le cadre métallique du guidon, formant un angle
étrange avec le reste de son corps. Ce matin je quitte la capitale dans la voiture de
Vivek. Nous ferons les 230 kilomètres séparant Delhi et Agra en 6 heures. 2
heures pour sortir de Delhi (20 kilomètres), 3 heures pour rejoindre Agra et
encore 1 heure pour traverser Agra (10 kilomètres). C’est dire si la
circulation en ville est infernale. Agra, c’est dans l’état de l’Uttar
Pradesh et c’est aussi là que règne le Taj Mahal, sa majesté, le palais des
palais. Le vendredi le Taj Mahal est fermé alors je visite le fort rouge qui
ressemble beaucoup à celui de Delhi. J’y reste presque 2 heures, parmi les
touristes français, indiens et même dominicains (à l’accent reconnaissable
entre mille), dont cette dame vêtue d’une sorte de pyjama vert fluo
absolument hideux. Pendant quelques secondes je suis aux Caraïbes. Samedi 22 octobre 2011 Le soleil se lève au-dessus du Taj Mahal. Immense
mausolée de marbre blanc qui s’offre aux regards de ses visiteurs. Chaque
jour (sauf le vendredi) ils sont des milliers à venir le voir, à marcher autour
de lui, à se promener dans ses jardins aérés. Ils lèvent les yeux et
sourient. Ils sourient de la chance qu’ils ont d’être là, pour toucher son
marbre et profiter de lui. Je fais partie des chanceux car ce matin j’ai vu.
J’ai levé les yeux sur le Taj Mahal, j’ai tourné autour de lui, j’ai marché
dans ses jardins aérés et j’ai touché son marbre blanc. 2 heures de regards
langoureux, d’œillades pour ce temple érigé en souvenir de la femme aimée et
trop tôt disparue. En partant j’ai lancé un dernier regard, celui du
souvenir, celui dont l’image restera au cœur et à la tête. Peut-être
reviendrai-je mais si je ne reviens pas, je ne t’oublierai jamais. Et demain
matin, au lever du soleil, d’autres viendront pour te voir et t’emporter avec
eux. Pour toujours.
Je quitte Agra pour Bharatpur. Passage par Fatehpur
Sikri et son palais. Un faux guide veut me vendre d’horribles objets en
marbre. Agacé, je pars. A Bharatpur, Vivek me présente son ami Arvind, un
jeune homme parlant un bon français appris à l’Alliance Française de
Pondichéry. Il est naturaliste et travaille au parc national Keoladeo. Ce
parc est connu des passionnés d’oiseaux. Ils viennent du monde entier pour
admirer, étudier et photographier près de 400 espèces différentes, migrantes
ou sédentaires, mais aussi les tortues géantes, les antilopes, cerfs,
chacals, pythons et autres animaux vivant libres et protégés. Je reste
l’après-midi à suivre Arvind m’expliquant les comportements des oiseaux qui
nous font l’honneur de se montrer. Je photographie beaucoup mais j’écoute et
regarde encore plus. Marcher dans une nature presque sauvage est reposant
après tant de jours dans l’urbanité indienne. La nuit remplace le jour et je
regarde le soleil, devenu orange, disparaître jusqu’à demain. Arvind et Vivek
vont au temple et je les accompagne. Je les regarde prier Vishnou, Shiva et
d’autres divinités d’une religion hindoue que je connais mal. La ferveur
religieuse est impressionnante et elle intègre tous les rangs de la société.
Ce pays si souvent dominé dans son histoire par d’autres peuples et
croyances, n’a jamais renoncé à ses origines cultuelles. Pour finir la
journée, Arvind m’entraîne au marché de Bharatpur. Une grande fête se prépare
(Diwali) et l’on vient acheter de nouveaux vêtements ou de quoi décorer sa
maison. Quant à moi, je retourne dans ma chambre d’hôtel avec dans la tête
plein d’images d’une journée d’une grande richesse. Dimanche 23 octobre 2011 4 heures de route pour rejoindre Jaipur, la capitale
du Rajasthan, aussi nommée The Pink City en raison de la couleur des pierres
utilisées pour l’édification des premiers bâtiments. Un peu comme Toulouse
mais quand même très différent. Je suis assez fatigué et un peu malade alors
je passe rapidement par le City Palace. Et pourtant la visite vaut la peine
car on y découvre au travers de salles d’époques différentes de nombreux
aspects de la vie des Maharajas. Je rentre tôt à l’hôtel pour prendre un peu
de repos. Lundi 24 octobre 2011 Amber est à une dizaine de kilomètres de Jaipur et
sa forteresse attire des centaines de touristes chaque jour. On peut y monter
à dos d’éléphant mais l’attraction purement occidentale que cela représente
me fait préférer la marche à pied. L’intérieur du fort est un dédale de
coursives menant à des salles ocres et des balcons rafraichissants. Entre les
Allemands, les Américains, les Français et quelques Indiens, je me faufile
joyeusement comme un enfant au supermarché. Sous un soleil puissant je tente
d’éviter les vendeurs de livres, de poupées, d’éléphants (en bois, en marbre,
en métal), les guides officiels ou non, les charmeurs de serpents, les
preneurs de photos et tous les fournisseurs de moyens de transport
(rickshaws, taxi, animaux diverses, hélicoptères, navette spatiales, etc.).
Mardi 25 octobre 2011 Presque 11 heures de route pour faire les 450
kilomètres séparant Jaipur d’Udaipur. Les routes indiennes ont des règles qui
leurs sont propres et les chauffeurs indiens également. Le problème est que
ce ne sont pas les mêmes règles… Bien que certaines routes ont une large
séparation pour différencier les sens de la circulation mais il n’est pas
rare de croiser des véhicules à contre-sens. De même voir des vaches surgir
au milieu de la voie n’est pas peu fréquent. Malgré cela on avance. Lentement
mais sûrement. Sur la route, halte à la forteresse de Chittorgarh, plus grand
fort du pays. Les forts en Inde, c’est comme les églises à Rome ou les
bordels à Tijuana, y’en a partout. J’avoue en avoir un peu marre des forts,
même si celui-là est extrêmement photogénique. En fin d’après-midi on arrive
enfin à Udaipur. L’hôtel a été réservé par Vivek et je dois dire que je ne le
regrette pas. Ma chambre est la suite Maharajah du Raj Niwas. Une grande
chambre très joliment décorée et surtout une immense terrasse donnant sur le
lac Pichola. C’est somptueux. Merci Vivek. Merci et adieu car il repart ce
soir chez lui à Jodhpur pour passer Diwali avec sa famille. Mercredi 26 octobre 2011 La vieille ville d’Udaipur est bâtie autour d’un lac
artificiel nommé Pichola. L’endroit attire les touristes du monde entier et
les prix courant (artisanat, restauration, etc.) s’en ressentent. Néanmoins
il est agréable de se promener dans ces petites rues pentues, entre temples
et boutiques sous un ciel plutôt bleu et une chaleur parfois accablante.
Je fais encore quelques achats de tissus mais aussi
du ticket d’entrée du City Palace (la demeure du Maharajah local) et celui du
tour de bateau sur le lac. Celui-ci est un piège à touristes mais bon. Je
reste une partie de l’après-midi sur la terrasse de ma chambre, à profiter de
la vue, à lire, m’assoupir, rêvant de danse et de pluie. Jeudi 27 octobre 2011 Encore quelques heures dans les rues d’Udaipur. Le
lendemain de Diwali, après une nuit de feux d’artifices (c’est fou ce que les
gens peuvent dépenser comme argent pour des pétards colorés qui finissent en
fumée), je vois des centaines d’hommes et de femmes faire la queue, pieds
nus, devant un temple. Des boutiques et des restaurants restent ouverts pour
les touristes mais c’est un jour férié. Je me promène encore dans les artères
de la ville avant de prendre un taxi pour l’aéroport. Chez Air India, les
hôtesses portent un sari et c’est très élégant. Le sari est définitivement
l’un des plus beaux vêtements du monde… Retour à Mumbaï, même douleur de la rue, même
chaleur aussi. Juste un peu plus de fatigue chez moi. Vendredi 28 octobre 2011 Aujourd’hui je veux assister au spectacle des
Dabbawallahs. Pour eux ce n’est pas un spectacle mais leur travail. Les
Dabbawallahs sont des transporteurs un peu particuliers. Leur mission est
d’apporter aux employés de la ville qui le leur demandent, des repas préparés
chez eux (les clients). En effet beaucoup d’Indiens pour des raisons
religieuses ou culturelles ne peuvent manger que des plats préparés dans des
conditions précises par des personnes précises et donc préparés chez eux.
Pour apporter ces repas à la bonne heure en ville, les Dabbawallahs vont les
chercher chez les clients, leur font prendre les transports en commun (le
train de banlieue le plus souvent) et les trient chaque jour de la semaine à
11h30 devant la gare du Churchgate, pour les distribuer plus tard dans les
bureaux. On parle de 200 000 gamelles (dabba) délivrées chaque jour par
ces wallah (personnes). C’est unique au monde. Ce matin à 11h30 je suis
devant Churchgate pour voir le triage des gamelles. Mais les Dabbawallahs ne
viendront pas. Est-ce à cause de la semaine de Diwali . Est-ce à cause d’une
grève ? Je ne le saurai jamais.
Samedi 29 octobre 2011 A présent Victoria Station s’appelle Chattrapati
Shivaji. C’est une gare mythique pour tous les amateurs de trains dont je
suis. Le bâtiment, immense, conserve une majesté toute britannique. A
l’intérieur c’est l’agitation habituelle des lieux publics, les voyageurs
montent ou descendent des trains, les vendeurs de tout genre proposent les
marchandises standards et la police surveille. Voilà mes dernières heures
dans ce pays. J’en profite pour faire quelques achats au Bombay Store :
du thé, de l’encens. De nouveau en balade dans les rues de Mumbaï, je
m’arrête un moment dans un petit parc cet je troque avec une bande de gamins
une bouteille de soda en échange de rien. Avant que la nuit ne tombe, je
décide d’une promenade sur Marine Drive. Mais ce malecón est
décevant, malgré la mer d’Oman, il manque de commerces, de lumières de
magasins, etc. C’est un lieu de vie mais triste. Triste comme la fin d’un
voyage.
La nuit est tombée, je dîne rapidement et file à
l’aéroport. C’est encore un spectacle, c’est encore intense, du monde partout
et moi au milieu qui regarde, acteur, spectateur, voyageur. Ce soir je quitte
ce pays et je me souviendrai longtemps de la beauté des femmes, des couleurs,
de la vie dans la rue, de la circulation dantesque, du bruit, de la
poussière, des flammes et de ce peuple, déroutant, différent, si loin de moi
et dont pourtant, enfin, je me sens proche. |
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